Publié le 11 Février 2019

Violences

Condamner la violence ou les violences ? Certes, mais ne sont-elles pas constitutives de l’existence humaine ? Celles judiciairement condamnables, celles d’oppression, de proscription, de domination, moins directes mais plus constantes et celles par délégation que l’on préfère ignorer, mais tout aussi destructrices, sur l’environnement par exemple. Enfin celles issues des luttes émancipatrices, d’oppositions, de résistances ou d’insoumissions. Dans nos sociétés occidentales, les violences sont aujourd’hui en partie policées, maîtrisées, canalisées, organisées et parfois même institutionnalisées.  La violence dans son état premier, sauvage et sanguinaire ne serait paraît-il plus au programme. Sauf celles, bien entendu, organisées et programmées au seul bénéfice du pouvoir politique et financier en place. Avec toujours les mêmes péquenots  embrigadés, les mêmes chairs à canon en première ligne. La violence du peuple est le résultat d’une longue mise sous le boisseau d’une rage qui face à la violence des conditions qui l’oppresse ne peut qu’éclater avec fureur, comme une bulle de gaz dans une mine souterraine. 

 

En France, ce cri  des gilets jaunes est primordial. Il est le signe d’une vie qui ne peut se contenter du sort ingrat qui lui est imparti.  Face  à l’idéologie dominante du mérite des premiers de cordée,  à l’oligarchie des élus, les laissés-pour-compte, les exclus et même les seconds de cordée qui épuisent leurs forces au profit de quelques-uns, en courant après le minimum vital, après la soumission, la frustration,  se révoltent. C’est un combat existentiel. L’homme n’est pas fait que de pain et de jeux. On peut le distraire un temps mais quand il prend conscience de  sa relégation au rang de piétaille négligeable, de variable d’ajustement, corvéable à merci, la colère gronde et n’a plus que la violence pour s’exprimer.  Si l’on redécouvre le plaisir du vivre ensemble et la solidarité sur le rond-point il y a aussi la jouissance de s’attaquer,  ne serait ce qu’aux symboles de ce qui nous contraint et qui sont l’ADN du pouvoir politique : la puissance publique et l’économie.

 

Le système capitaliste maîtrise très bien son discours pour contraindre la populace à accréditer ses théories. « Les gueux » abandonnés à leur sort, n’ont pas les mêmes facilités. Face à la morgue culturelle, ils veulent « simplement » dénoncer les sacrifices imposés, présentés comme  la seule politique possible et le mépris et la violence qui les accompagnent. Ils veulent améliorer leurs conditions de vie, un avenir où ils ne seraient plus qu’un élément du productivisme. Ils ne seront plus accessibles à la dialectique du formatage  qui les tient habituellement sous sa coupe.  Ils ont rompu, pour un temps, avec la résignation et la société des compromis. Cette violence qui instrumentalisée par le pouvoir lui permettra d’imposer alors son modèle de société comme incontournable, de faire accepter son tout sécuritaire pour éviter  des désordres qu’il participe à faire émerger.  Il faudra alors toujours  recommencer pour faire évoluer sa situation à la marge jusqu’à remettre en cause le système dans sa globalité.

 

Je ne fais pas ici l’apologie de la violence, mais je l’estime inévitable, quand toujours la même caste hégémonique impose, qui plus est au nom de la démocratie, une politique sociale et économique injuste, des choix sociétaux discriminatoires sans laisser alors d’autres alternatives aux citoyens de seconde classe, que la révolte.                          MireilleMOUTTE

 

QUAND L'ORDRE EST INJUSTICE, LE DÉSORDRE EST DÉJÀ UN COMMENCEMENT DE JUSTICE.                              Romain ROLLAND

 

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Rédigé par ab irato

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