MICROCOSME
Publié le 11 Février 2025
Il était une fois dans un pays pas si lointain une immense forêt de cèdres vierge et sauvage située à l’adret des coteaux du Véron à plus de 1500 mètres d’altitude. (Le décor est planté, vous voyez le tableau ?….) Un cèdre gigantesque, robuste et vigoureux domine toute la canopée de plusieurs toises. Un point de repaire idéal pour la faune des alentours, les cerfs aiment venir bramer sous sa ramure et les biches des environs sont invariablement attirées par cet appel puissant. Un torrent turbulent s’échappe au pied de la butte, désaltérant au passage tout ce qui marche, court, grimpe, vole et rampe. (Un lieu de rendez-vous idéal !).
Tout est en place depuis des siècles et se renouvelle harmonieusement. Les prédateurs prédatent, les brouteurs broutent et les grignoteurs grignotent, tandis que l’herbe, les fougères, les arbustes et les bois croissent. (Que demander de plus! Il faut être à la hauteur de la situation c’est tout.) Chacun tient au mieux son rôle prédestiné par sa nature sans problème métaphysique. Vivre, manger, se reproduire, mourrir et entre temps souffrir. La vie, la mort étaient en ces temps harmonieux pas plus importantes que le hululement du hibou ou le battement d’ailes du papillon. Un fait incontournable pour que tout se perpétue.
Les jours et les nuits se succèdent sans plus de bouleversement que celui des saisons et leurs influences inévitables sur le déroulement des activités productives. (A ce point du récit vous pouvez déjà comprendre que je ne pourrai pas tel Jean de la Fontaine extraire de mon propos une quelconque morale. Je ne suis pas fan de l’anthropomorphisme et l’homme étant absent du théâtre des opérations, la leçon est à exclure. Le rire et la morale sont paraît-il le propre de l’Homme ! ).
Par une belle journée de printemps, sous un soleil étincelant, une lumière évanescente, un vent léger dans les frondaisons, des senteurs de sous bois, de terre, d’ humus. Sans bruit, sans agitation excessive si ce n’est le chant d’amour d’un rouge-gorge pour un coucou, un bourdonnement d’abeilles. Soudain un bruit sourd inconnu du gibier l’alerte…. Une paire de bottes a franchi la lisière du bois, écrasé une fleur, des fougères, détruit le roncier, souillé l’eau pure. L’Homme en prédateur supérieur s’est imposé en composante incontournable de ce microcosme.
Le géant superbe et altier à l’arborescence dense et parfumée domine ce malotru de toute sa hauteur, de toute sa prestance….de tout son mépris. Il est en deux coups de tronçonneuse et sans autre préambule transformé en lames de parquet. Tous les habitants des bois s’ils le peuvent s’enfuient vers des cieux plus cléments (enfin, ils l’espèrent !).
Cette fin paraît assez simpliste, prévisible et ne nécessite aucune conclusion plus élaborée si ce n’est qu’effectivement la terre est un lieu commun aux prédateurs et aux proies, aux « gentils » comme aux « méchants ». Je ne vais finalement pas vous imposer les méandres de cette pensée rudimentaire et quelque peu binaire. Je vous laisse à vos propres errements et comme tout est dans tout et inversement, il va falloir faire avec.